… ou empruntez un juif ? un néo-nazi ? un catho ? une bourge ? un djeun de la té-ci ? un patron ? une RMIste ? un ancien combattant ? un homo ? un flic ? un ex-dealer ? une handicapée ? Vous pouvez l’emprunter (gratuitement) à la bibliothèque du coin, pour 30 à 45 minutes de discussion franche et sans tabou. C’est le concept que propose les « Living Library ».
En plus de prêter des bouquins, certaines bibliothèques vous proposent d’emprunter des personnes. L’objectif est de vous permettre de rencontrer des personnes, des cultures et des savoirs auxquels vous n’auriez pas accès « dans la vie courante », histoire d’aller voir au-delà des préjugés et de rencontrer l’autre. Histoire d’explorer la diversité humaine dans un lieu neutre et sans risque : 30 minutes de discussion à la bibliothèque.
Le concept est original et expérimenté dans divers endroits à travers le monde : aux USA, en Suède, au Canada, en Australie et en Grande-Bretagne. Mais rien en France ??? Si la médiathèque de ma ville se lançait dans ce jeu-là, je n’hésiterais pas à jeter un coup d’oeil à leur catalogue, voire à me « proposer à l’emprunt » dans les catégories « un geek », « un ptit bourge », « un entrepreneur », « un papa de triplés »… :-)
Ces initiatives me rappellent ce que fait depuis de nombreuses années, dans un style un peu kitsch mais très pionnier (à l’époque…), sans jamais vraiment « décoller » ni se marier vraiment avec l’Internet, le mouvement des réseaux d’échanges réciproques de savoirs. Dans un registre différent, cela me fait aussi penser à ce que font certaines startups qui proposent aux personnes de monnayer le temps passé avec elles au téléphone : conseil de bricolage ou d’informatique, soutien scolaire ponctuel, voyance, astrologie, téléphone rose !
J’imagine que, pour une bibliothèque municipale moyenne, il « suffirait » de lancer un appel aux associations locales en leur demandant si elles ont des préjugés à faire tomber et donc des personnes-livres à « prêter » pour des entretiens de 30 minutes chaque. La municipalité pourrait en faire un événement sur un week-end au cours duquel se feraient les « emprunts » (discussions), dans les locaux de la bibliothèque.
Au-delà d’une formule événementielle, l’idéal serait quand-même d’avoir un système d’information public par le biais duquel les bibliothèques adhérentes non seulement accèderaient à un catalogue des personnes « empruntables » dans les environs (pour le proposer à la consultation dans leurs locaux et avec leur assistance) mais aussi aideraient les « demandeurs » à faire leur choix et à s’inscrire dans l’agenda des personnes qui se proposeraient à l’emprunt. Sans obligation de réciprocité. (Ma pub: si une association avec les reins un peu solides était intéressée par un tel projet, je pourrais lui fournir gratuitement les ingénieurs pour réaliser toute la partie technique de ce projet).
Bref, je trouve que c’est une idée sympa et à laquelle j’aimerais bien goûter dans une humanithèque près de chez moi.(Oh mais j’y pense, c’est ATD Quart-Monde qui devrait se lancer là-dedans, pour apprendre aux moins pauvres et aux plus pauvres à mieux vivre ensemble, en commençant par s’emprunter dans une bibliothèque ? ouais, non, c’est pas forcément une bonne piste…).
Je pense aussi à tout le savoir et la richesse de nos petits et grands vieux et au plaisir qu’a mon grand-père à ressasser les épisodes les plus remarquables de sa carrière militaire… Peut-être qu’il serait prêt à aller jusqu’à la bibliothèque municipale, certains samedis, pour répondre à la curiosité d’éventuels emprunteurs ? Mais est-ce qu’il y aurait des emprunteurs ? Les « best-sellers » seraient peut-être plutôt un ex-taulard ? une jeune femme qui porte le tchador (ou la burqa ?) ? … A votre avis, quels seraients les best-sellers si une humanithèque ouvrait prêt de chez vous ?
[via Designing for civil society], voir aussi cet article du Times
Je trouve l’idée sympa. Mais c’est un peu comme les livres : j’ai envie d’en lire plein, mais pas d’idée pour en écrire. Là j’aurais envie d’emprunter plein de gens, mais aucune idée de comment me proposer !
Ceci dit, y a des lieux qui proposent déjà ça, très répandus chez nos amis anglo-saxons : les pubs jouent cette fonction de « brassage social ». C’est moins le cas en France, mais ça le devient de plus en plus avec l’interdiction du tabac dans les cafés.
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